vendredi 30 mars 2018

Le mystère de Pâques

Le mystère de Pâques


Illustration : polyptyque Passion et Résurrection, œuvre du peintre ARCABAS, Abbaye de Notre Dame de Leffe

Pâques est à la fois la fête la plus importante pour les chrétiens et, en même temps, le mystère le plus difficile à croire. 

"Si le Christ n'est pas ressuscité, notre prédication est donc vaine et votre foi aussi est vaine."Cette parole de Paul dans la première Épître aux Corinthiens (15, 14) le dit bien. La résurrection de Jésus est la clé de voûte de la foi chrétienne. Mais comment comprendre l'indicible ? Quel sens donner au mot ressuscité ? Comment se réjouir d'une telle folie qui est aussi une folle espérance ?
Le mystère est si profond que l'on peut être tenté de n'en rien dire. C'est Michel Deneken, théologien, premier vice-président de l’université catholique de Strasbourg, qui répond à quelques questions :




Jésus est-il vraiment mort ?
Tous les Évangiles insistent sur la réalité de cette mort. Ils parlent de la crucifixion et de la mise au tombeau. Le message pascal n’est pas négation de la mort. Il est d’abord à considérer du point de vue du mystère de la mort.
 
Ressuscité, qu’est-ce que cela veut dire ?
Le mystère pascal est inexprimable. Le Nouveau Testament utilise un langage approximatif qui privilégie la rencontre. Le ressuscité se donne à reconnaître dans son humanité, mais il faut un peu de temps pour faire le lien entre celui qui apparaît et le crucifié.
 
Pourquoi le ressuscité ne ressemble pas au Jésus d’avant ?
Il est le même et il lui ressemble même tellement que les disciples vont finir par l’identifier. Mais pas immédiatement, parce qu’il y a, dans les récits de Pâques, la volonté de mettre en scène ce que les disciples ont expérimenté après Pâques, c’est-à-dire leur retour à la foi. Si l’on était en face de textes trafiqués, les évangélistes ne parleraient pas du doute, comme avec Thomas, ou de la difficulté à reconnaître.
 
Qu’est-ce qui permet de dire que le Christ est ressuscité ?
Nous sommes dans l’ordre de la foi. Le Nouveau Testament est construit à partir de cette expérience que les disciples, qui ont vécu avec Jésus, appellent Pâques et Résurrection. Cette expérience, les chrétiens d’aujourd’hui lui donnent un caractère fondamental et fondateur.

Pâques, pourtant, a perdu de sa force dans nos sociétés occidentales…
Parce que de tous les mystères chrétiens, c’est le plus difficile à croire ! Un être normal commence par réprouver l’idée de la résurrection. Au sens chrétien du terme, ce n’est ni un simple retour à la vie, ni une réincarnation, ni une séparation de l’âme et du corps. Ce fondement du christianisme nécessite que celui y croit fasse lui-même le saut de la foi.
 
L’Église n’a-t-elle pas trop longtemps insisté sur la mort plutôt que sur la résurrection ?
C’est encore vrai. On a tendance à s’arrêter sur la croix. On a peur de faire apparaître la résurrection comme une espèce de « machin » qui rende la mort légère. Mais qu’est-ce qui est le plus scandaleux ? Un messie crucifié ou un crucifié ressuscité ? Je constate un retour à un certain dolorisme. Ce qui m’intéresse chez Jésus c’est sa vie devant Dieu qui peut être un chemin pour moi.
 
Comment rendre plus accessible ce message d’espérance ?
Ce qui compte, c’est la crédibilité de ceux qui sont censés en parler. Clairement, qu’est-ce que ça fait dans ma vie personnelle que Jésus soit ressuscité ? Il y a une vraie panne, aujourd’hui, des discours sur l’espérance, sur l’avenir et la beauté du monde qui atteint aussi l’Église. La crédibilité de son discours est sans cesse remis en cause. On lui dit : si l’espérance est de votre côté, cela ne se voit pas trop.
 
Mais Pâques, n’est-ce pas aussi un regard d’espérance sur le monde présent ?
Évidemment. Ce qui a bouleversé la vie des disciples, c’est de découvrir que la bonne nouvelle de la résurrection est, ici et maintenant, déjà à l’œuvre. La clé du mystère pascal est dans la confiance. Faire une confiance totale à Dieu, alors que tout porte à être méfiant.
 
N’y a-t-il pas trop de chrétiens tristes ?
C’est cette très belle formule du cardinal Etchegaray : « Dans l’Église, il y a trop de saules pleureurs et pas assez de pins parasols. » Il ne s’agit pas de faire un christianisme exalté qui fait du volontarisme spirituel. Mais quand l’Église institutionnelle est en crise, il faut revenir aux fondamentaux : la prédication du Christ ressuscité. La crédibilité des témoins du ressuscité doit se voir dans leur vie. C’est pour cela que les contre-témoignages, comme les affaires de pédophilie dans l’Église, sont terribles.
 
Restez-vous malgré tout optimiste ?
Des pans de murs s’effondrent, mais il y a aussi des jeunes pousses. Le vrai problème pour les responsables de l’Église, et je m’y inclus, c’est de s’attarder sur ce qui s’écroule et de ne pas regarder ce qui est en train de pousser. Mais encore faut-il que ce qui pousse ne soit pas contingenté dans des serres où l’on trace au cordeau ce qui a le droit de grandir, et que l’on ait un tout petit peu d’ouverture pour toutes les plantes. Ce n’est pas à nous de séparer le bon grain et l’ivraie.



jeudi 29 mars 2018

Pessa'h. La Pâque juive





Pessah. La Pâque juive commence le soir du 30 mars


Pessah commence au coucher du soleil le 30 mars jusqu'au 7 avril




Pessah commémore l'exode des Hébreux hors d’Égypte et la fin de leur l'esclavage. Elle a aussi une signification agraire qui repose, elle, sur la célébration du printemps, au début de la moisson de l'orge.
Selon le récit biblique, les Israélites furent esclaves en Égypte pendant quatre cent trente années avant d’être libérés.
Cet esclavage valut aux Égyptiens d’être frappés, en punition, par les plaies d’Égypte. Ces dernières sont une marque de la protection et de la faveur que Dieu manifeste à son peuple.
Guidés par Moïse, les israélites sortirent d’Égypte en traversant la mer Rouge qui s’assécha pour qu’ils puissent la franchir à pied sec, et se referma sur les troupes du pharaon, qui se noyèrent.



Plus largement aujourd’hui, on fête la libération et la liberté en général ; c’est également un temps de compassion pour tous ceux qui sont victimes de toute forme d’esclavage, souhaitant avec ardeur que toute l’humanité puisse prétendre aux joies et aux responsabilités de la liberté.

...Et comme toujours l'autodérision n'est jamais loin...




lundi 26 mars 2018

KAWABATA. Les Belles Endormies. Extrait







    Le vieil Eguchi en était venu, dans cette maison, à penser que rien n’était plus beau que le visage insensible d’une jeune femme endormie. N’était-ce pas la suprême consolation que ce monde pouvait offrir ? La plus belle femme ne saurait dans le sommeil dissimuler son âge. Un jeune visage est agréable dans le sommeil, même si la femme n’est pas une beauté. Peut-être aussi ne choisissait-on dans cette maison que des filles agréables à voir dans leur sommeil. Eguchi se contentait de contempler de tout près le petit visage, et il lui semblait que sa propre vie et ses mesquins soucis de tous les jours se dissipaient mollement. Il suffirait sans aucun doute de prendre le somnifère et de s’endormir dans cet état d’esprit pour jouir de cette nuit bénie, mais le vieillard paisiblement tenait les yeux clos et restait immobile. Cette fille déjà lui avait permis de se ressouvenir de la femme de Kôbe, et il lui semblait qu’elle devait encore lui accorder quelque autre souvenir, dont le sommeil risquait de le frustrer.
    L’intuition subite que la jeune femme de Kôbe s’était, dès le retour de son mari après deux ans d’absence, trouvée enceinte, et le sentiment que cette intuition devait de toute nécessité être conforme à la réalité, s’était imposés au vieillard qui ne parvenait plus à s’en défaire. Son aventure avec Eguchi ne pouvait, pensait-il, avoir infligé ni honte ni souillure à l’enfant porté et mis au monde par elle. Le vieillard ressentait comme une bénédiction sa grossesse et son accouchement, dès lors qu’il les tenait pour certains. En cette femme vivait et se mouvait une jeune vie. Pour lui, c’était comme si, à cet instant, on lui avait fait connaître sa propre vieillesse. Mais pourquoi cette femme s’était-elle docilement abandonnée, sans répulsion ni réticence ? Comme si le vieil Eguchi n’avait pas vécu près de soixante ans déjà. Il n’y avait chez cette femme rien de vénal, ni rien de frivole. Eguchi s’était senti avec elle moins coupable en tout cas que là, dans cette maison, étendu aux côtés de la fillette endormie d’un sommeil suspect. Jusqu’à sa façon de se hâter, le lendemain matin, fraîche et dispose, pour retourner chez elle auprès de ses petits enfants, que le vieillard avait appréciée en la regardant de son lit. La pensée qu’il se pouvait qu’elle fût pour lui sa dernière femme jeune la lui avait rendue inoubliable, mais peut-être elle non plus n’avait-elle oublié le vieil Eguchi. Sans qu’ils en eussent été profondément blessés ni l’un ni l’autre, et dussent-ils en garder le secret toute leur vie, ni l’un ni l’autre sans doute n’oublierait jamais.
    Il était étrange malgré tout que, parmi les « Belles endormies », ce fût la petite apprentie qui eût, en ce moment, suscité chez le vieillard le souvenir distinct de la femme de Kôbe.


Yasunari Kawabata
In Les Belles Endormies眠れる美女
Prix Nobel de littérature en 1968





Les Belles Endormies est disponible en poche. Une édition luxueuse mais abordable (image ci-dessus) reste disponible chez Frédéric Clément. 









dimanche 25 mars 2018

Le dimanche il n'y a pas photo


Le dimanche il n'y a [toujours] pas photo, si ce ne sont quelques chiens (en général des labradors) 
puis des femmes (en général élégantes) 
puis des hommes (uniquement élégants) 
puis les G.A.M.B. (se prononce avec l'accent anglais)






















































...les G.A.M.B.'
Grace, Audrey, Marilyn et Brigitte




Grace










Audrey











Marilyn


Happy birthday Mr. President, 19 mai 1962







Brigitte
















samedi 24 mars 2018

Klimt. Le centenaire (1918-2018)






Tout le monde a vu les tableaux de Gustav Klimt, même déclinés en effets vidéos, ou en réalité virtuelle; on reconnait son style. Il fait partie des artistes les plus célèbres. Pourtant, 100 ans après sa mort, sa peinture est toujours aussi énigmatique. Gustav Klimt c'est un style unique, presque ésotérique, et s'il recouvre ses muses avec de l'or ce n'est pas un hasard. Fils d'un orfèvre, il applique le métal au pinceau en couches épaisses. Et, comme pour les icônes byzantines ou celles de l'Égypte ancienne, c'est sa façon de créer un espace sacré.

Personne ne le voit jamais peindre

De l'or, des femmes divinisées : chaque tableau de Klimt est à la fois magique et inquiétant. Gustav Klimt, lui-même, cultive ce mystère. Tous les jours, il passe neuf heures dans son atelier et pourtant personne ne le voit jamais peindre. À Vienne (Autriche), des historiens ont reconstitué cet endroit secret. À cette époque, à Vienne, c'est la fin d'un monde et c'est bientôt la guerre. Gustav Klimt est hanté par la mort et aujourd'hui, un siècle plus tard, il nous lègue la plupart de ses mystères.


Idylle (Idylls), 1884

Avenue du parc de  Schloss Kammer, 1912

Nu assis

Portrait of Helene Klimt, 1898


Nu couché

Nu couché sur le ventre le visage tourné vers la droite , 1910

Adam et Eve (détail)

Fischblut- Poisson (1897-98)

Portrait of Emilie Flöge, 1902

L'arbre de vie (Stoclet Frieze), ca. 1905-09)

Roses sous les arbres

La vie et la mort, 1916
Emilie Flöge, 1922
C'est elle qui semble être le modèle de la très fameuse toile Le Baiser.



1912